Artiste en vedette : Hugo Sabourin (al. Yugz)

Photo : Richard Tardif

Photo : Richard Tardif

Par Cindy Savard

Hugo Sabourin, aussi connu sous le nom d’artiste Yugz, est originaire de l’Outaouais, là même ou il évolue, s’émancipe et contribue à rendre notre monde définitivement plus brillant. Son parcours l’ayant mené à vivre des expériences de vie qui auront eu des impacts significatifs sur ses choix de carrière, les arts visuels se sont présentés à lui comme une soupape, une façon efficace d’évacuer un fort besoin d’expression. Artiste multidisciplinaire, on peut se réjouir de bénéficier de ses multiples talents qui contribuent certainement à la réputation de la région, un terreau décidément fertile pour la création :

« À la base, si on prend la musique, la radio, les arts visuels. J’ai toujours été intéressé par les communications, je ressentais un fort besoin de communiquer. [Les arts visuels] c’était pour moi un moyen d’expression comme jouer de la batterie, les mots, la musique … »

Ayant grandi à Angers (il insiste pour ne pas confondre sous Masson-Angers ou encore Gatineau. Angers, c’est Angers!), son parcours est particulièrement intéressant compte tenu du fait qu’il n’avait pas l’intention de devenir peintre, il visait plutôt les communications comme milieu de prédilection pour sa carrière. Dans sa jeune vingtaine, la musique l’a d’abord inspiré, il est d’ailleurs devenu un musicien chevronné, il performe aujourd’hui au sein du groupe FLAGG qui devait partir en tournée à travers le pays avant que frappe la pandémie. La formation prévoit toutefois sortir une maquette pour préparer la sortie d’un premier vinyle. 

À Herst, un artiste peintre est né

Lors d’une aventure à Herst en Ontario, Hugo décroche un emploi à la radio à Mont Laurier où il en a profité pour découvrir ce médium. Lorsqu’il donne sa démission, quatre ans plus tard, une relation d’amitié naît systématiquement entre lui et sa successeure, Claude Surprenant. Elle organise un événement en arts visuels dans les Hautes Laurentides et la radio diffuse un cours 101 sur ses ondes qui culmine avec un tirage. C’est Hugo qui remporte la mise, un kit de peinture à l’huile. Ce fut le début d’une grande histoire d’amour entre Hugo et les arts visuels, juste comme ça, un artiste était né :

« J’avais pas besoin de parler, de mettre des mots sur ce que je voulais dire, un coup de pinceau et je pouvais m’exprimer. »

Son art a dès lors suscité un engouement, il a vendu sa première toile sur les ondes de la radio de Mont Laurier, il a remis tous les profits à la Fondation contre le Cancer. Ce fut le début d’une nouvelle ère dans la vie de Yugz qui a dès lors utilisé son surnom hérité à l’enfance pour s’identifier comme artiste. Pour ceux qui se demandait d’où lui venait ce pseudonyme, ceci explique donc cela!

Yugz au fil du temps

Quand on s’attarde à l’évolution des oeuvres de Yugz, on constate qu’il s’est d’abord fait connaître avec ses premières séries mettant en vedette des oiseaux au bec pointu à saveur abstraite, voire même très cartoonesque :

Hugo Sabourin (Yugz)

Hugo Sabourin (Yugz)

« J’ai exploré beaucoup au début, j’ai été beaucoup autodidacte, je ne me suis pas laissé “encarcaner”. Ce qui unifie toutes mes oeuvres, c’est que je crée au fil de mes besoins. En 2011, 5000 oiseaux sont mort subitement dans la capitale de l’Arkansas à la veille du Jour de l’an et je voulais m’exprimer là-dessus. » 

Une simple consultation du compte Instagram de Hugo Sabourin suffit pour se rendre compte du bois duquel il se chauffe comme artiste. Un style éclaté et éclectique, des séries conçues principalement à base de peinture à l’huile et à l’aérosol, des couleurs fortes, généreuses et vives font sa réputation. Judicieusement sélectionnées, ces toiles ne représentent qu’une parcelle de ce qu’elles dégagent en réalité et il faut savoir que bien d’autres créations restent volontairement à l’abri de l’oeil public, précieusement conservées pour être exposées au monde réel. En attendant ce moment, elles attendent patiemment leur tour, dans le cadre idyllique de son havre en forêt à Saint-Pierre-de-Wakefield.

De l’art conceptuel, porteur d’un message

Par Hugo Sabourin / Sourires contagieux : Sourire 3 fois par jour rend inutile tout médicament (chinois)

Par Hugo Sabourin / Sourires contagieux : Sourire 3 fois par jour rend inutile tout médicament (chinois)

Pour ceux qui ont assisté à la P’tite St-Jean en mode virtuel, Yugz offrait une prestation artistique en direct de l’événement où il s’est exprimé à partir de la prémisse de la pandémie et du confinement. Il a mis en lumière son côté infantilisant - la manière dont les autorités s’exprimaient à la population - ce qui l’a amené à développer l’idée de la série des bonhommes sourires un peu glauque pour exprimer la peur du virus :

« J’ai accroché sur l’idée du masque qui pourrait devenir obligatoire. La face c’est tellement les premiers indices qui te donnent une idée de la personne. La contagion du sourire, le sourire camouflé par le masque. Le sourire en danger, en voie d’extinction. Dans ma technique, je fais un smile, ensuite les deux yeux et j’utilise de la peinture vraiment baveuse. J’attends un peu et ensuite je mets une feuille par-dessus pour calquer le sourire. »

L’intention derrière cette série visait à rendre compte d’un phénomène et l’art devient un fabuleux prétexte pour se saisir d’un moment historique. Sans tomber dans la pathos, ses toiles émanent d’un équilibre entre l’espoir et la critique sociale, le tout est évocateur d’un optimisme profond envers la suite. Et au-delà de la critique, Hugo Sabourin s’est investi d’une mission sociale qui dépasse largement l’appât du gain :

« Au début en 2007, j’ai découvert la puissance de la peinture pour raconter des choses et de son pouvoir thérapeutique. Je fais une toile, je la mets sur le web et je peux remettre les fonds pour contribuer à une cause. J’ai besoin de sentir que ce que je fais fais du bien, que je suis capable de faire quelque chose qui puisse aider. » 

Le rôle de l’artiste

L’histoire ayant démontré à quel point la culture agit comme vecteur d’évolution sociétale, Hugo Sabourin abonde dans ce sens et s’engage dans cette perspective :

« Un artiste peut vivre de son art et se péter les bretelles mais il a rôle de raconter son époque, de dénoncer. L’artiste est un peu comme un historien qui va parler de la société dans laquelle il vit. Je pense à la Guernica de Picasso. Il a toujours dit que ça n’avait pas de lien [avec les atrocités de la guerre d’Espagne] mais je vois là un travail essentiel. Banksy est un artiste parfait. On sait pas c’est qui, son travail parle pour cette entité sans mettre son égo en avant-plan. Il dénonce des choses et ça devient tellement gros que tout le monde en parle. »

Photo : Richard Tardif

Photo : Richard Tardif

Hugo Sabourin étant lui-même une personnalité très discrète, il s’auto-proclame comme étant « ultra sauvage » et il préfère de loin contempler les beautés naturelles de la nature qu’à s’afficher publiquement. Il a installé son hâvre à Saint-Pierre-de-Wakefield, là même où il incube et laisse l’art se déployer à travers lui. Si vous cherchez à saisir son inspiration en plein vol, Hugo a partagé l’une de ses esquisses avec la Ville de Gatineau qui a rendu accessible une série d’images à imprimer et à colorier. Son œuvre « Phone Mobile » qui est accrochée sur les murs extérieurs de l’Université du Mexique, au 55 du Portage est dorénavant accessible en ligne et prête à colorier. Qui sait, voilà peut-être l’occasion de découvrir l’artiste qui sommeille en vous?!