Le Festival de Jazz d’Ottawa 2023 en trois performances clés

Snarky Puppy en spectacle au Festival de Jazz d’Ottawa de 2023. Photo : Curtis Perry Photography

Pendant huit jours, le centre-ville d’Ottawa a été inondé par les sons de certains des meilleurs artistes jazz de notre époque, passant par des légendes comptant plus de sept décennies de carrière jusqu’aux nouvelles coqueluches de la scène. Bien que les têtes d’affiche performant sur la scène principale, incluant Buddy Guy et Feist, sont généralemet les concerts attirant les plus grandes foules, la série After Dark, présentée sur la scène OLG à la place Marion-Dewar, est conçue pour les plus aventureux (et les oiseaux de nuit, faut se le dire, car les concerts débutent à 22 h 30). Mais pour celles ceux qui en ont l'endurance, la série offre souvent les meilleures soirées du festival et l’équipe du Pressoir a bravé la pluie, le smog et l’heure tardive pour en profiter. Nous avons eu le plaisir d’assister à plusieurs excellents concerts, dont Colin Stetson au studio Azrieli du CNA et Herbie Hancock au parc de la Confédération, mais ce sont les prestations de fin de soirée qui nous ont beaucoup marqué et qui ont, selon nous, attirés les meilleures foules. Félicitations à l’équipe pour une autre édition bien réussie; nous avons déjà hâte à l’année prochaine!

Voici notre compte-rendu du Festival de Jazz d’Ottawa en trois performances clés de la série After Dark sur la scène OLG : 

TEKE::TEKE en spectacle au Festival de Jazz d’Ottawa de 2023. Photo : Erik Stolpmann

TEKE::TEKE

On retrouvait une petite cohorte d’amateurs du groupe montréalais de surf-rock japonais TEKE::TEKE assemblés devant la scène, mais la foule consistait principalement d’amateurs de jazz curieux assis qui s’étaient laissé intrigués par la description au programme du festival. Ces curieux ont vite été convertis grâce au dynamisme du groupe et du charisme de la chanteuse Maya Kuroki. Ayant tout récemment lancé leur deuxième album Hagata, la formation a beaucoup évolué depuis ses débuts en tant que groupe hommage au guitariste Takeshi Terauchi. Quoique le groupe ait préservé ses racines de surf-rock, ce sont des sonorités nettement plus psychédéliques qui nous attendaient et qui ont réussi à amener une grande partie de la foule à ses pieds. On peut dire avec certitude que le groupe a quitté Ottawa avec pas mal plus de fans qu’avant leur performance.

Sun Ra Arkestra en spectacle au Festival de Jazz d’Ottawa - Photo : Scott Simpson

Sun Ra Arkestra

Fondé à Chicago en 1955, le groupe Sun Ra Arkestra a pris plusieurs formes depuis ses presque 70 ans d’existence. Malgré le fait que son fondateur, le musicien Herman Poole Blount alias Sun Ra, soit décédé en 1993, son legs perdure grâce au maestro saxophoniste avant-gardiste Marshall Allen, qui, à 98 ans, ne performe avec le groupe qu’aux environs de Philadelphie, et un collectif évolutif de musiciens, plusieurs jouant avec le groupe depuis les années 70. Tous les éléments signatures d’un spectacle du Sun Ra Arkestra étaient à l’affiche : des costumes de scène flamboyants et colorés, une grande influence afro-futuriste, plusieurs solos mettant en valeur le talent de chacun des musiciens, et un groove infatigable et entraînant. Le public était révérencieux, peut-être même un peu trop, et est largement resté assis tout le long de la performance. Heureusement, le groupe a facilement compensé, en grande partie grâce à la chanteuse Tara Middleton et au saxophoniste Knoel Scott, et nous a offert une prestation haute en couleur et en génie.

KOKOROKO en spectacle au Festival de Jazz d’Ottawa - Vidéo : Scott Simpson

KOKOROKO

Si on se fie à la longue file à l’entrée du site et au tintamarre entendu sous le chapiteau en attendant le concert, l’octuor britannique KOKOROKO était bien connu du public du Festival de jazz d’Ottawa avant de monter sur scène. Avec seulement un album à leur actif, le jeune groupe a donné l’impression d’être de vrais vétérans du jazz sur scène. Mené par la trompettiste et chanteuse Sheila Maurice-Grey, avec la tromboniste Anoushka Nanguy à ses côtés, KOKOROKO a donné une prestation digne de la fureur qu’il évoque chez le public et les critiques. Dès son entrée sur scène, Maurice-Grey a exigé que la foule se lève pour lancer un concert dynamique de 90 minutes qui s’est rarement atténué. L’aisance avec laquelle le groupe joue est aussi impressionnante que la virtuosité de chacun des membres, mélangeant des influences ouest-africaines à des sonorités londoniennes. C’est un groupe résolument moderne, mais qui ne manque pas de faire ses révérences aux artistes les ayant inspiré, tels que Fela Kuti et Tony Allen, culminant en un concert qui a su plaire au public intergénérationnel. Un des grands moments forts de l’édition de 2023 du Festival de Jazz d’Ottawa.